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jours de plus en plus fort. Au premier essai du grand écart, je manquai de me pourfendre ; au saut de la chaise, je me rompis le nez. Brisé, moulu, dégoûté d’une si périlleuse gymnastique, je pris le parti d’annoncer à M. Comus, que décidément je ne me souciais pas d’être sauteur. Ah ! tu ne t’en soucies pas, me dit-il et sans rien m’objecter il me repassa force coups de cravache ; dès ce moment Balmate ne s’occupa plus de moi, et je retournai à mes lampions.

M. Comus m’avait abandonné, ce devait bientôt être au tour de Garnier de s’occuper de me donner un état : un jour qu’il m’avait rossé plus que de coutume (car c’était un exercice dont il partageait le plaisir avec M. Comus), Garnier, me toisant de la tête aux pieds, et contemplant avec une satisfaction trop marquée le délabrement de mon pourpoint, qui montrait les chairs : « Je suis content de toi, me dit-il, te voilà précisément au point où je te voulais ; à présent, si tu es docile, il ne tiendra qu’à toi d’être heureux ; à dater d’aujourd’hui, tu vas laisser croître tes ongles ; tes cheveux sont déjà d’une bonne longueur, tu es presque nu, une décoction de feuilles de noyer fera le reste. » J’ignorais où Garnier voulait en venir, lorsqu’il