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habitations, je frappai à la porte d’une chaumière. Une femme âgée vint ouvrir, et m’introduisit dans une pièce assez grande, mais qui, pour la malpropreté, l’eût disputé aux plus sales taudis de la Galice ou des Asturies. La famille se composait du père, de la mère, d’un jeune garçon, et de deux filles, de quinze à dix-sept ans. Lorsque j’entrai, on faisait des espèces de crêpes avec de la farine de sarrasin ; tout le monde était groupé autour de la poêle, et ces figures, éclairées à la Rembrandt par les seules lueurs du foyer, formaient un tableau qu’un peintre eût admiré ; pour moi, qui n’avais guère le temps de faire attention aux effets de lumière, je témoignai le désir de prendre quelque chose. Avec tous les égards qu’inspirait mon costume, on me servit les premières crêpes, que je dévorai, sans même m’apercevoir qu’elles étaient brûlantes à m’enlever le palais. Depuis, je me suis assis à des tables somptueuses ; on m’a prodigué les vins les plus exquis, les mets les plus délicats et les plus recherchés ; rien de tout cela ne m’a fait oublier les crêpes du paysan bas-breton.

Le souper terminé, la prière se fit en commun. Le père et la mère allumèrent ensuite leurs