dont rien ne distrait le forçat. Dans la suite de ces Mémoires, j’aurai occasion de revenir sur ce sujet, à propos de cette surveillance qui constitue une nouvelle peine pour les hommes libérés.
Les inconvénients et les abus que je viens de signaler existaient pour la plupart au bagne de Brest lorsque j’y fus conduit ; raison de plus pour abréger le séjour que je devais y faire. En pareil cas, la première chose à faire, c’est de s’assurer de la discrétion de son camarade de couple. Le mien était un vigneron des environs de Dijon, de trente-six ans environ, condamné à vingt-quatre ans pour récidive de vol avec effraction : espèce d’idiot, que la misère et les mauvais traitements avaient achevé d’abrutir. Courbé sous le bâton, il semblait n’avoir conservé d’intelligence que ce qu’il en fallait pour répondre avec la prestesse d’un singe ou d’un chien, au sifflet des argousins. Un pareil sujet ne pouvait me convenir, puisque, pour exécuter mon projet, il me fallait un homme assez résolu pour ne pas reculer devant la perspective des coups de bâton, qu’on ne manque jamais d’administrer aux forçats soupçonnés d’avoir favorisé, ou même connu l’évasion d’un condamné. Pour me débarrasser du Bour-