barrassait-on dans sa chaîne ou dans celle de son voisin, les coups de bâton pleuvaient aussitôt sur le maladroit. Dès que nous fûmes couchés sur quelques poignées de paille qui avaient déjà servi de litière aux bestiaux, un coup de sifflet donna l’ordre du silence le plus absolu ; il ne fallait même pas le rompre pour la moindre plainte quand pour relever un factionnaire placé à l’extrémité de l’étable, les argousins nous marchaient sur le corps.
Le souper se composa d’une prétendue soupe aux haricots, et de quelques morceaux de viande demi gâtée. La distribution se faisait dans des baquets de bois qui contenaient trente rations, et le cuisinier, armé d’une grande cuiller à pot, ne manquait pas de répéter à chaque condamné qui se présentait : Une, deux, trois, quatre, tends ta gamelle, voleur ! Le vin fut distribué dans le baquet dont on s’était servi pour la soupe et la viande ; ensuite un argousin prit un sifflet pendu à sa boutonnière, et le fit résonner à trois reprises, en disant : Attention, voleurs, et qu’on réponde par oui ou par non ! Avez-vous eu le pain ? Oui. La soupe ? Oui. La viande ? Oui. Le vin ? Oui… Alors, dormez ou faites semblant.