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pitié de moi : c’était encore Poyant, fieffé vaurien, dont les habitants d’Arras peuvent se rappeler les hauts faits. Je lui confiai mes peines. « Eh quoi ! me dit-il, tu es bien bête de rester à l’attache, et puis ça n’a-t-il pas bonne mine, un garçon de ton âge, n’avoir pas le sou ? va ! si j’étais à ta place, je sais bien ce que je ferais. – Eh ! que ferais-tu ? – Tes parents sont riches, un millier d’écus de plus ou de moins ne leur fera pas de tort : de vieux avares, c’est pain béni, il faut faire une main-levée. – J’entends, il faut empoigner en gros ce qu’on ne peut pas avoir en détail. – Tu y es : après l’on décampe, ni vu ni connu. – Oui, mais la maréchaussée. – Tais-toi : est-ce que tu n’es pas leur fils ? et puis ta mère t’aime bien trop. » Cette considération de l’amour de ma mère, joint au souvenir de son indulgence après mes dernières fredaines, fut toute-puissante sur mon esprit ; j’adoptai aveuglément un projet qui souriait à mon audace ; il ne restait plus qu’à le mettre à exécution ; l’occasion ne se fit pas attendre.

Un soir que ma mère était seule au logis, un affidé de Poyant vint l’avertir, jouant le bon apôtre, qu’engagé dans une orgie avec des filles, je