manque d’argent. J’étais évidemment placé dans la dernière de ces catégories ; cependant il fallait dîner : opération souvent beaucoup plus difficile que ne l’imaginent ces heureux du siècle qui croient qu’il ne faut pour cela que de l’appétit.
On m’avait fréquemment parlé de la vie aventureuse et lucrative des contrebandiers de la côte ; des détenus me l’avaient même vantée avec enthousiasme, car cet état s’exerce quelquefois par passion, même de la part d’individus que leur fortune et leur position devraient détourner d’une carrière aussi périlleuse. Pour moi, j’avoue que je n’étais nullement séduit par la perspective de passer des nuits entières au bord des falaises, au milieu des rochers, exposé à tous les vents connus, et de plus aux coups de fusil des douaniers.
Ce fut donc avec une véritable répugnance que je me dirigeai vers la maison d’un nommé Peters, qu’on m’avait désigné comme faisant la fraude, et pouvant m’embaucher. Une mouette clouée sur la porte, les ailes étendues, comme ces chats-huants et ces tiercelets qu’on voit à l’entrée de beaucoup de chaumières, me fit aisément reconnaître son domicile. Je trouvai le patron dans une espèce de cave, qu’aux cables,