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10e, et entre autres un lieutenant nommé Villedieu qu’on verra reparaître plus tard sur la scène. Tous ces gens-là ne m’avaient connu au régiment que sous un de ces noms de guerre, comme on avait l’habitude d’en prendre à cette époque, et ils ne furent nullement étonnés de me voir porter le nom de Rousseau. Je passais les journées avec eux au café ou à la salle d’armes ; mais tout cela n’était pas fort lucratif, et je me voyais encore sur le point de manquer absolument d’argent. Sur ces entrefaites, un habitué du café, qu’on nommait le Rentier, à cause de sa vie régulière, et qui m’avait fait plusieurs fois des politesses dont il était fort avare avec tout le monde, me parla avec intérêt de mes affaires, et me proposa de voyager avec lui.

Voyager, c’était fort bien : mais en quelle qualité ? Je n’étais plus d’âge à m’engager comme paillasse ou comme valet de chambre des singes et des ours, et personne ne se fût, sans doute, avisé de me le proposer : toutefois il était bon de savoir à quoi s’en tenir. Je questionnai modestement mon nouveau protecteur sur les fonctions que j’aurais à remplir près de lui. « Je suis médecin ambulant », me dit cet homme, dont les favoris épais et le teint basané