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cette misère hideuse qui grouille dans les quartiers de l’East End et déborde même dans les autres, où elle se mêle à l’activité brutale des hommes de négoce et de finance. La grande ville lui apparaissait comme le séjour sans joie, où luttent âprement pour des intérêts matériels des hommes sans idéal. On comprend aussi avec quelle mélancolie il songeait à la nécessité de quitter la Maison Rouge, laissant derrière lui tant d’œuvres d’art et de souvenirs heureux. Mais il n’était pas de ceux qui s’abandonnent à leurs regrets, et il quitta brusquement Upton en 1865. Il n’y devait jamais revenir et laissait aux nouveaux propriétaires, avec les vitraux et la décoration peinte par Burne-Jones et Rossetti, un certain nombre de meubles difficilement transportables comme le magnifique banc à baldaquin dessiné par Philippe Webb.

À Londres les ateliers venaient d’être agrandis et transférés Oueen’s Square (Bloomsbury). Les commandes devenaient plus nombreuses ; Morris se réserva la direction artistique de l’entreprise et dut prendre un gérant chargé spécialement de l’organisation commerciale : ce fut d’abord George Warrington Taylor, puis à partir de 1870 George Wardle. Cet arrangement lui rendit quelque loisir; d’autre part, comme il n’avait plus à venir chaque jour d’Upton il gagnait encore quelques heures de liberté et il en profita pour revenir à ses poèmes et tenter de nouvelles expériences de décoration et de teinture.

Pendant plus de dix années il va mener de front ce double labeur artistique et littéraire, produisant des œuvres nombreuses, inégales, mais originales le plus sou-