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naient à reproduire les formules traditionnelles sur le mauvais goût étranger et la supériorité indiscutable du génie français, il eut, sans nier la valeur de nos envois, la très rare pénétration de montrer que nous commencions à perdre notre originalité. L’habileté technique de nos artisans restait hors de pair, mais dans nos produits s’affirmait une réelle pauvreté d’inspiration. L’appel de L. de Laborde ne fut pas entendu ; dans le grand mouvement de transformation artistique qui marque la seconde moitié du dernier siècle, la France ne fut qu’une tard venue. Protégés un moment par les succès d’autrefois, leur réputation, la situation acquise, nos industriels crurent qu’il leur serait possible de transgresser la grande loi qui veut que l’art soit en perpétuelle évolution sous peine de s’étioler, et il fallut tout l’effort de quelques esprits clairvoyants, de quelques artistes originaux, pour bien mettre en lumière la perte de notre prépondérance en matière de goût et indiquer les remèdes.

Mais n’est-il pas maintenant trop tard pour tenter de reconquérir cette suprématie artistique qui faisait la France grande entre toutes les nations ? D’aucuns l’affirment, cependant ce n’est pas une idée de découragement, un conseil de résignation à l’inévitable que nous entendons donner ; nous pensons avec Courajod qu’« avec l’art français qui ne dit jamais son dernier mot, avec cet art dont les transformations sont illimitées, l’avenir n’est pas fermé, et nous avons le devoir d’espérer des émotions inédites ». Quelles que soient les réserves que l’on veuille formuler sur le présent, il est impossible de nier l’effort