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pour cet artiste qui, pareil aux maîtres de la Renaissance, semblait avoir le don d’universalité, qui passait avec joie d’un poème à une tapisserie, d’un carton de vitrail à une enluminure, d’un motif de papier peint à une traduction et toujours réussissait à produire de la beauté.

Mais très vite nous comprendrons que derrière la personnalité si riche du poète et de l’artiste, il y en a une plus riche et plus belle encore, celle de l’homme dont les sympathies allaient aux déshérités qu’il aurait voulu convier à toutes les joies de la vie. Le grand peintre G.-F. Watti nous a laissé un portrait de Morris à trente-sept ans[1]. Le visage est énergique et volontaire, les traits un peu gros, la bouche plutôt sévère et comme dédaigneuse, la chevelure et la barbe abondantes et un peu en désordre, mais cet aspect est embelli par la hauteur du front, et surtout par les yeux au regard très profond et très doux. Ces yeux bleus, largement ouverts, furent une énigme pour ses contemporains. Il a l’air généralement absent, disait-on. Il semblait regarder sans voir, mais en fait il avait un coup d’œil d’une sûreté et d’une justesse admirables ; un seul examen, même rapide, lui suffisait presque toujours pour juger des hommes et des choses et il semblait que ces yeux, inexpressifs en apparence, eussent le magique pouvoir de fouiller les consciences. Un air de grande bonté est l’impression dominante.

D’autres portraits nous montreront Morris vieilli,

  1. Ce portrait se trouve à la National Portrait Gallery de Londres.