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La vallée a pris dès lors la forme et les proportions d’un grand cirque. La Seine y promène ses méandres. Au Nord, l’horizon est accidenté par les étroites rangées des collines ou par les buttes qu’ont respectées les courants. Au Sud, règne la ligne continue à laquelle la Seine appuie ses puissants méandres. Des hauteurs s’y rattachent et s’allongent en forme de terrasses entre les sinuosités du fleuve. Le spectacle de l’ample cirque revient ainsi successivement à Saint-Cloud, Saint-Germain, Andrésy, toujours le même dans son ordonnance générale, mais varié dans le détail. Les rampes qui bordent l’ouverture et le sommet des méandres ménagent des abris qui, dans les replis de cette vallée très déprimée, suffisent à créer, aux orientations favorables, de petits climats locaux. L’empereur Julien parle des vignes et des figuiers qu’il y avait vu cultiver ; il les y verrait encore.


II. - LA VALLÉE DE L'OISE DANS LA RÉGION PARISIENNE

L’OISE, dans ce faisceau de rivières, a une physionomie à part. Depuis Compiègne jusqu’au moment où, au pied du roc de Beaumont, elle pénètre dans les calcaires, son cours est généralement tracé à travers des argiles et des sables qui donnent à la vallée un aspect tout autre. C’est qu’en effet les terrains qui dominent dans cette vallée sont les couches meubles situées à la base des formations éocènes, qui se superposent immédiatement à la craie. L’Oise a établi cette section de son cours dans une sorte de charnière qui suit à peu près le contact de la craie blanche et des terrains tertiaires.

On se souvient que nous avons signalé en Picardie l’existence d’une série d’ondulations par lesquelles la craie se relève et s’enfonce alternativement : après l’anticlinal du Boulonnais, le synclinal de la vallée de la Somme, enfin l’anticlinal du Bray. L’extrémité orientale de ces accidents est traversée à plusieurs reprises par le cours de l’Oise. Lorsque ce sont les voûtes anticlinales de ces ondulations dont le prolongement croise la vallée, le bombement crayeux affleure à la surface, et immédiatement au-dessus de lui les sables et les argiles qui le suivent dans la série chronologique. Ce cas se reproduit plusieurs fois entre le confluent de l’Aisne dans l’Oise et celui de l’Oise dans la Seine : d’abord en face de Compiègne, puis en face de Pont-Sainte-Maxence ; enfin entre Précy et Beaumont-sur-Oise. Chaque fois, le phénomène se traduit par un élargissement anormal de la vallée et l’apparition d’une dyssymétrie qui est une surprise pour le regard. Tandis qu’à gauche le net dessin du relief et les couronnements boisés ne cessent pas d’indiquer la présence du Massif tertiaire, l’œil se perd, à droite, sur de grandes surfaces agricoles, nues, répondant au type connu des paysages de la craie. Ce sont ces croupes qui, en face des coteaux de Luzarches. constituent, sur l’autre rive de l’Oise, le pays appelé la Thelle.