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de la roche. Le plus souvent on ne peut que les deviner aux touffes d’arbres, aux rangées de villages qui suivent la zone à proximité.

La seule différence entre la vallée briarde au-dessous de Château-Thierry et celle des environs de Paris, c’est que, dans la Brie parisienne la bande argileuse s’étale généralement à mi-coteau. Cela tient à ce que près de Paris l’édifice géologique est resté plus complet ; il a conservé le couronnement des couches supérieures qui là-bas ont disparu de la surface.


II LE CIRQUE PARISIEN

La Marne a franchement entamé le massif de la Brie : la Seine a cherché à s’échapper vers le Sud-Ouest. Elle s’est détournée pendant 65 kilomètres de sa direction normale. Elle a même abdiqué temporairement sa forme de vallée dans le large sillon qui borde le pied du Massif tertiaire et que les suintements de la craie, de concert avec les inondations de la rivière, transforment périodiquement vers la fin de l’hiver en une plaine noyée. Il fallut à la Seine la poussée de l’Yonne, le choc de la ligne directrice des grands courants du Morvan, pour qu’elle se décidât à creuser, dans l’extrémité de la Brie, de Melun au cap de Villeneuve-Saint-Georges, une vallée plus courte, mais analogue à celle de la Marne.

Ramenées ainsi l’une vers l’autre, les deux rivières ont tâtonné pour se rencontrer. Des traînées d’alluvions anciennes montrent les issues successives par lesquelles elles ont communiqué. La Seine a contribué à déblayer la grande plaine qui s’ouvre au Nord du débouché de Villeneuve-Saint-Georges. Mais elle y a été puissamment aidée par la Marne[1]. Il est impossible de ne pas être frappé de la prépondérance qui appartient aux grands courants de l’Est et du Nord-Est, dans le déblaiement de ce qui est devenu la dépression parisienne (30-20 mètres d’altitude absolue). La Marne, secondée par l’Ourcq, a fait irruption par Claye et Gagny et déblayé au Nord des coteaux de Vaujours et des collines d’Avron, de Romainville et de Montmartre, la dépression qui s’appelle la Plaine de Saint-Denis. Le mince arc de cercle des coteaux de Vaujours et de Montfermeil s’interpose, laminé par les courants, entre cette plaine d’alluvions et l’anse abritée dans laquelle les remous laissèrent tomber les sables et graviers de la station préhistorique de Chelles. Puis, par le détroit de Nogent, la Marne vint mêler son champ d’action à celui de la Seine. Avant de fixer son confluent à Charenton, elle a poussé jusqu’entre Sucy et Bonneuil un méandre aujourd’hui atrophié, mais dont la trace est visible. Confondant enfin leurs efforts, les deux courants ont largement entaillé une vallée commune, qui ne se ferme qu’à 35 kilomètres de leur confluent, devant les coteaux de l’Hautie, dont l’obstacle contient et dirige vers le fleuve principal le cours de l’Oise.

  1. La topographie de la région parisienne est admirablement éclairée par la carte géologique Paris et ses environs, à l’échelle de 1 : 40 000 (en 4 feuilles), qu’a publiée en 1890 le Service de la Carte géologique détaillée de la France (Paris, Baudry).