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Les vicissitudes persistèrent pendant la période oligocène. De nouveau une période lacustre succéda à la phase lagunaire : c’est au fond de lacs d’eau douce que se déposèrent les travertins qui constituent les plateaux de la Brie. Enfin, par un revirement inattendu, au moment où l’on pouvait croire la région définitivement émergée, la mer reconquiert le domaine qu’elle semblait avoir perdu. Elle vient toujours de la direction du Nord ; mais cette fois elle pénètre plus loin vers le Sud qu’aucune transgression marine antérieure. La zone de sables qui s’étend de Fontainebleau à Rambouillet indique les limites qu’elle a atteintes. C’est la dernière des invasions marines qu’ait connues la région parisienne. Elle fut remplacée par ces lacs d’eau douce qui prirent vers le Sud une extension très considérable, et dont les dépôts ont formé le calcaire de Beauce.


II RAPPORT AVEC LA TOPOGRAPHIE

Il était nécessaire de retracer cette histoire. Si différentes que paraissent les scènes qu’elle évoque devant l’esprit, leurs vestiges n’en constituent pas moins les éléments de la topographie actuelle de la région parisienne. Ils se traduisent dans les formes, les cultures, les positions de villages ou de villes. On distingue, par échelons successifs, la composition du sol sur laquelle se sont exercés les courants diluviens, le bloc complexe qu’ils ont dégrossi et façonné. Car ce sont ces puissants sculpteurs qui finalement ont introduit dans cette matière le modelé, la ciselure, et donné à la topographie cette variété minutieuse qui ouvre un jeu si riche aux combinaisons de l’activité humaine.

L’effort des eaux, là comme partout, s’est arrêté aux roches les plus dures, qu’il a façonnées en plates-formes. Elles constituent le plan de surface. Au-dessous se creusent des vallées dont les bords montrent par tranches l’affleurement des couches inférieures, jusqu’à l’argile plastique qui, par sa consistance imperméable, définit le fond du lit. Au-dessus se dressent, réduits à des crêtes amincies, mais visibles par leurs tranches jusqu’au calcaire de Beauce, les lambeaux des couches supérieures. Vallées, collines et plateaux, autant de faces différentes de l’action des courants quaternaires, s’entremêlent et se croisent dans la topographie parisienne.

De tous côtés, au Nord comme au Sud, à l'Est comme à l’Ouest, le plateau entre dans la physionomie de la région parisienne. Il forme l’encadrement de la dépression que la convergence des courants a modelée entre Meaux et Corbeil en amont, Poissy en aval. Ces plateaux diffèrent, d’ailleurs, entre eux. Au Nord s’élèvent lentement les sèches plates-formes du travertin lacustre qui constituent le Valois. Au Sud, c’est par lambeaux seulement qu’apparaissent les hautes plaines qui ne prendront leur développement qu’après Etampes, sous le nom de Beauce. A l’Ouest, les belles rampes calcaires que traverse l’Oise avant son confluent annoncent le Vexin ; tandis qu’à l’Est, le plateau compact à travers lequel la Marne et la Seine ont dû