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Elle ne fut plus, dès lors, qu’un instinct lâché. Toutes les heures coulèrent, également mornes, dans leur variété. Monique s’agitait dans une sorte de nuit morale. L’énergie qui la poussait à vivre n’était plus assez forte pour la guider, dans sa dérive. Après le rétablissement qu’elle était parvenue à faire, c’était de nouveau la chute, et cette fois, estimait-elle, irrémédiable. Réagir ? Dans quel but ? Elle ne croyait plus à rien.

Cet obscur sentiment de la lumière qui est au fond de tous les êtres et qui subsistait en elle, parmi les ténèbres de l’inconscient, la soulevait pourtant encore à son insu, au-dessus de la boue où sans regrets et sans remords elle croyait enfoncer, définitivement.

Monique restait, malgré elle, de ces natures si foncièrement droites qu’un coup de barre les peut redresser, à l’instant où il semble qu’elles chavirent. Mais, de cette conviction, seuls étaient pénétrés les deux êtres qui la connaissaient bien et qui avaient gardé pour elle un peu de l’affection portée à la tante Sylvestre.