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SPOKANE ET LES INDIENS

prête ; pour un nouveau venu c’était un spectacle intéressant de voir à la table de communion l’interprète debout à côté du prédicateur  ; celui-ci procédait par phrases courtes et multipliées  ; la traduction suivait aussitôt, alerte et naturelle : «  Quel est ce petit enfant qui nous tend les bras dans la crèche ?… C’est le Fils du Roi des rois  ; c’est celui qui gouverne l’univers… Et d’où vient-il, ce petit enfant ?… Il vient du ciel où nous espérons le voir un jour… Que vient-il faire sur la terre, ce petit enfant ?.. Il nous apporte la joie et le bonheur, etc…  » Je ne comprenais point la traduction de ces paroles, et ne pus saisir qu’un mot, le mot «  Miaz  », qui signifie petit enfant, et qui revenait sans cesse.

Après la grand’messe, il y eut conseil des chefs  ; le R. P. de la Motte, arrivé récemment de Rome, les avait convoqués pour leur donner des nouvelles du Saint-Père et les consulter sur les besoins de la mission. Quand nous entrâmes dans la Salle du Conseil, ils étaient déjà là cinq ou six chefs, assis sur un banc, silencieux et impassibles. Nous prîmes place vis-à-vis d’eux, et pendant plusieurs minutes le plus profond silence régna dans la salle. Les Indiens, avant de parler, tiennent à s’établir dans le calme le plus absolu  ; ils maîtrisent leurs émotions par un acte de volonté et donnent à leur visage une expression de complète indifférence. Enfin l’un d’eux se leva et lentement prononça quelques paroles de bienvenue, adressées au Supérieur général de la mission  ; puis il se rassit. Le P. de la Motte observa le même cérémonial avant de répondre  ; pendant quelques minutes il resta silencieux et parut impassible  ; puis il prononça en anglais un petit discours sur Rome et le Saint-Père dont l’interprète donna la traduction indienne phrase par phrase. Ensuite il leur demanda s’ils désiraient quelque chose ou s’ils