mille livres de Piémont, environ quatorze cents sequins de Florence, ce qui formait peut-être un peu plus de la moitié de tous mes revenus à cette époque. Content de ce qui me restait, il me semblait que je ne payais pas trop cher de l’autre moitié l’indépendance de mon opinion, et avec la liberté de ma plume celle de séjourner où il me plairait. Mais cette donation de mes biens et son entier accomplissement fut pour moi la source d’une infinité d’ennuis et de dégoûts, grâce à toutes les formalités légales qui ne pouvaient manquer de prendre beaucoup de temps, l’affaire s’étant traitée par correspondance. Il y fallut, en outre, ces éternelles autorisations du roi ; car, en ce bienheureux pays, il n’est pas d’affaire si privée où le roi n’intervienne. Il fallut que mon beau-frère, travaillant pour lui comme pour moi, obtînt du roi la permission d’accepter mes biens, et se fit autoriser à me payer cette redevance annuelle partout où il me plairait de me fixer. Aux yeux des moins clairvoyans il était bien manifeste que le principal motif de cette donation était la résolution que j’avais prise d’abandonner le pays. De là cette nécessité d’obtenir la permission du gouvernement qui aurait toujours pu, selon son bon plaisir, s’opposer à ce que cette pension me fût soldée en pays étranger ; mais très-heureusement pour moi, le roi d’alors, qui certainement avait pénétré ma pensée (plus d’une fois je l’avais trahie), eut plus de plaisir encore à me laisser partir qu’il n’en aurait eu à me retenir. Il consentit sur-le-champ à me voir me dépouiller
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