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CHAPITRE XXIV

DEPUIS LA FIN DE DÉCEMBRE 1794
JUSQU’AU JOUR OÙ NOUS REÇÛMES L’AMNISTIE
LE 3 JANVIER 1795


J’étais si animée contre l’idée de me rendre, que je voulus aller à Nantes, pour voir par moi-même ce qu’il en était de l’amnistie. Je partis avec un paysan ; j’avais un dépôt sous le bras, je fis plus de dix lieues à cheval, l’abcès creva en route, je ne fus pansée qu’à minuit. Mon exaltation était telle au physique et au moral, que rien ne pouvait m’arrêter. J’entrai dans Nantes, vêtue en paysanne ; je descendis avant la ville ; je portais sur mon dos un bissac, et à la main des poulets ; j’arrivai chez une personne de la connaissance de Mme Dumoustiers, j’y trouvai Mlle Carria et Agathe qui venait de sortir de prison ; Mmes de Bonchamps et de Bonnay y étaient encore, j’allai les voir, elles avaient obtenu ce jour même leur liberté, les prisons étaient à peu près vides. Ces dames m’engagèrent à me rendre à l’amnistie, me firent voir M. Haudaudine [1], j’appris que les

  1. Pierre Haudaudine, né à Bayonne le 19 novembre 1756, mort à Nantes le 6 août 1846.