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cette hauteur avec mille à douze cents hommes pour commencer l’attaque. On leur avait dit que toute l’armée se trouverait deux heures après aux portes de la ville, mais, au lieu de cela, cette escarmouche dura sept heures. La poudre allait manquer, Henri court à cheval pour en chercher et presser la marche des troupes, M. de Lescure reste seul à commander ; il s’aperçoit que les Bleus commencent à s’ébranler ; alors, n’écoutant que son courage, il prend un fusil à baïonnette, crie aux soldats d’avancer, et, descendant du rocher, il arrive jusque sur le pont ; là il reçoit toute une décharge de mousqueterie et de mitraille qui traverse ses habits ; s’apercevant qu’aucun paysan n’a osé le suivre, il remonte, les appelle, redescend, retourne sur le pont, reçoit une nouvelle décharge, et, se voyant absolument seul, il revient chercher les paysans et retourne au pont pour la troisième fois ; alors, suivi d’un seul soldat, mais voyant arriver MM. de la Rochejaquelein et Forest au grand galop pour le seconder, il franchit le pont le premier, le soldat le second, celui-ci est blessé ; Henri, descendu de cheval, passe le troisième, Forest le quatrième ; ils se jettent dans les retranchements, les paysans accourent en foule, et tous les Bleus qui s’y trouvaient se rendent ; ces messieurs restèrent pour garder le passage et les prisonniers. L’attaque générale commença ; mon père et M. de Marigny prenaient par le pont Saint-Jean, MM. d’Elbée, Stofflet par le côté opposé, M. de Bonchamps par un autre[1].

Au bout de deux heures de combat, la ville se rendit. Pendant la bataille, M. de Lescure et Henri faisaient démolir sans bruit le mur de la ville, à coups de pique, par les soldats ; sitôt que la brèche fut faite, ils entrèrent[2] avec une partie de leur monde pour ouvrir la porte à M. d’Elbée ; ils arrivèrent dans le

  1. Voir à l’appendice, note 1.
  2. Henri agrandit de ses mains la brèche et la franchit le premier, étant monté sur les épaules de Toussaint Texier, un des plus intrépides parmi les braves. Né à Courlay en bas Poitou le 24 mars 1769, Texier fut nommé sous la Restauration