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D’autres en furieux se frappaient la poitrine,
Et tous criaient : « Seigneur, ayez pitié de nous !

Ô Dieu, mon Dieu ! maître du ciel et de la terre,
Qui soulevez la mer immense et la calmez,
Jésus mort sur la croix pour nous avoir aimés,
Quand visiterez-vous la maison solitaire ?

Nous avons tout jeté dans le gouffre écumant,
La fleur de notre corps et la foi de notre âme.
Nous avons jusqu’au bout suivi la route infâme ;
Seigneur, vous le savez, nous souffrons justement.

La luxure nous a noyés dans son abîme,
L’orgueil a pris nos cœurs et les a desséchés ;
Nous ne pouvons porter le poids de nos péchés,
Et toujours devant nous resplendit l’ancien crime.

Oh ! l’affreux souvenir qui hurle et nous poursuit !
Ahès, le prince avec son rouge sortilège,
Les blasphèmes sans nom, l’inouï sacrilège
Par qui flamboie encor l’épouvantable nuit !…

Misérable vermine, insensés que nous sommes !
Si nous souffrons, mon Dieu, nous l’avons mérité,
Mais vous êtes aussi l’éternelle bonté
Et vous avez pleuré sur le malheur des hommes.