Page:Vibert - Pour lire en automobile, 1901.djvu/371

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 343 —

Il partit, mais vint me revoir souvent et ce diable d’homme était si convainquant, si bien armé, au point de vue scientifique, qu’il finit par m’arracher la promesse que j’accepterais la présidence d’honneur de l’entreprise.

Deux ans se passèrent ainsi en préparatifs ; il avait fait installer une usine colossale aux portes de Paris, près des fortifications et le travail de percement du globe, comme il se plaisait à dire lui-même allait bientôt commencer et incessamment, il allait venir m’inviter, en grande pompe — sans calembour — à donner le premier coup de pioche, lorsqu’un matin il entra en coup de vent chez moi ; les yeux hors de la tête et s’affala dans un fauteuil.

— Ah ! mon ami, je suis perdu.

— Comment cela ?

— C’est bien simple, vite votre avis. Je perce jusqu’au centre de la terre et nous descendons toujours et je fais descendre à volonté mes coins perforateurs, comme force hydraulique, par des tuyaux.

— Évidemment.

— Oui, mais après, dans la seconde partie de la percée vers les Antipodes, je continue à descendre ?

— Non, vous remontez.

Et alors éclatant dans un coup de désespoir :

— C’est ce que je viens de me dire, mais alors mon coin ne descend plus, il me faudrait des pompes foulantes et je n’obtiendrais jamais la force nécessaire…

— C’est certain, mais percez le puits par les deux bouts, avec vos calculs très exacts, les deux tronçons se réuniront sûrement au centre de la terre.