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— Mon cher, une découverte curieuse : chez moi la matinée finit à midi, d’accord avec le dictionnaire. Ici les matinées durent jusqu’à sept heures du soir, et c’est ainsi que tous les dimanches, tous les jeudis il y a des matinées dans les théâtres et je suis invité à des matinées dans le monde. Comme c’est amusant.

— Mais oui, fis-je machinalement, et je restai trois mois sans avoir de ses nouvelles.

Un beau jour il m’écrivit :

— Viens me voir, je suis couché, avec un bon coup d’épée dans les côtes, j’étais invité par des amis à déjeuner, je suis arrivé à quatre heures, on m’a fait grise mine, on buvait des bocks, après le café, en m’attendant. J’ai fait observer timidement que jusqu’à sept heures du soir la matinée n’était pas encore écoulée. Le mari, un colonel, m’a dit que je me moquais d’eux, il a fallu aller sur le terrain, mais oui ou non la matinée dure-t-elle jusqu’à sept heures du soir ? je suis très perplexe.

Je volai chez lui, le soignai et le consolai de mon mieux et lui fis comprendre qu’il ne fallait pas confondre la matinée des théâtres avec la matinée astronomique.

À quelque temps de là il fut obligé de retourner plusieurs fois de suite dans son pays, voir sa mère malade et comme il disait à un employé du chemin de fer :

— Je ne voudrais pas partir dans la matinée, mais seulement le soir ; l’employé lui répondit :

— Parfaitement, nous avons votre affaire à une heure 45 du soir.

Il arriva tranquillement à la gare en sortant de