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Conte de Noël

Le réveillon en Bretagne. — La vallée de Josaphat. — Coquetterie suprême.

Comme tous les ans, j’étais allé passer la seconde quinzaine de décembre en Bretagne, non loin du Huelgoat-Locmaria, chez mon vieux camarade d’enfance, le baron de Poullaouen, qui vivait là assez retiré, dans le vieux et modeste château quasiment féodal, mais bien détérioré de ses aïeux.

Il avait trouvé le moyen d’écorner encore pas mal le patrimoine maternel, en voulant se livrer dans la contrée à l’exploitation de mines de plomb-argentifères, devenues trop pauvres et trop envahies par les eaux pour pouvoir avoir un rendement rémunérateur, de sorte qu’il vivait de plus en plus renfermé chez lui et passait dans le pays pour fort original.

Au moment précis où je me trouvais chez lui, à la Noël, il y a environ sept ans, il pouvait bien avoir dans les trente-quatre à trente-cinq ans. Grand, droit, bien campé, avec une admirable barbe noire en éventail, il avait l’air et la majesté d’un empereur assyrien et il était vraiment très beau, d’une beauté mâle et douce, tout à la foi, qui subjuguait tous ceux qui l’approchaient.

Et cependant on disait dans le pays qu’il ne vou-