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roi et une reine, aux attributs peints et admirablement conservés sur les sarcophages.

Quand j’ouvris les deux petits, avec plus d’émotion encore, je me trouvai en face de deux superbes momies de jeunes fillettes d’une dizaine d’années — les enfants du couple royal — tenant dans les bras… quoi ? Je vous le donne en mille… chacune une superbe poupée égyptienne, bien habillée et avec des étoffes sans doute très passées, sans jeu de mot, comme leurs petites maîtresses, mais encore intactes.

C’était la première fois que l’on faisait une semblable découverte dans les tombeaux Égyptiens ; les larmes me coulaient silencieusement sur les joues, des larmes de joie et de stupéfaction et, en vérité, les hommes de mon escorte étaient aussi troublés que moi.

J’étais là, bête, anéanti, n’osant violer cette jeunesse interrompue par la mort depuis des milliers d’années, cette enfance que je retrouvais figée dans ses jeux hiératiques ! C’était fou et sublime et ces deux momies de fillettes m’en imposaient plus que celles de leurs parents, parce que, même vue ainsi, à travers la nuit profonde du temps et de l’espace, la mort de l’enfant est toujours infiniment impressionnante.

Combien restai-je ainsi ? je n’en sais rien, mes hommes n’avaient plus peur, parce que, petit à petit, ils avaient deviné une partie des sentiments tout à la fois tumultueux et supérieurs qui s’étaient emparé de mon âme et que, dans une certaine mesure, dans la mesure de leur culture intellectuelle restreinte, ils