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fait hors de proportion avec son embonpoint plus que modeste.

Pense donc que ma pauvre mère pèse à l’heure actuelle 391 kilos, tu as bien lu : trois cent quatre-vingt onze kilogrammes, sans compter plusieurs décas.

En voyant les dépôts calcaires du Pont du Gard, je me suis dit :

— Voilà ! Avec nos mauvaises eaux, ma mère a la pierre, c’est-à-dire des dépôts calcaires qui ont dû tapisser son estomac et ses intestins, d’autant plus que je me suis souvenu de lui avoir entendu dire plusieurs fois, en souriant tristement :

— Mon cher Will, j’ai, comme tu dis dans ton horrible argot de Paris, la gueule de bois et cependant je n’ai pas mangé trop de saumon, moi, je n’ai point fait la noce.

Hélas ! ce n’était pas la gueule de bois, mais de pierre, qu’elle avait.

Maintenant que je connais sa maladie, que je sais pourquoi elle est si lourde, qu’elle ne peut plus ni marcher, ni même se tenir debout, je suis plein d’espoir. J’ai parlé aux médecins de dissolvants, mais ils m’ont répondu que le remède serait pire que le mal, produisant des érosions et pour le moment nous nous en tenons à un massage méthodique, mais très violent, dans la ferme espérance d’arriver à briser les couches de chaux qui lui tapissent tout le corps à l’intérieur et finiraient par lui boucher tout à fait les conduits digestifs.

Je te tiendrai au courant.

À toi,

Will.