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vait partir que le samedi du Havre, à moins qu’il ne passât par l’Angleterre. Mais cela ne lui aurait pas fait gagner grand temps et je me disais que j’allais bien avoir trois semaines, peut-être un mois à attendre, avant d’avoir de ses nouvelles.

Quelle attente cruelle, aussi cruelle que l’énigme ! Mon jeune ami était bien pondéré, sérieux, intelligent et cependant il nous avait paru à tous fou à lier pendant cette inoubliable matinée passée dans l’étroit canal du Pont du Gard.

Enfin, au bout de vingt six jours, je reçus de lui la curieuse lettre suivante :

Milwaukee (Visconsin)
E. U. S — ce 13 juin 1898.

Mon cher ami,

Madame Vibert, en me voyant filer à la gare du Pont du Gard, a dû me prendre pour un fou ; il n’en était rien heureusement. Seulement la vue de ces dépôts de chaux dans l’étroit canal du Pont du Gard avait été pour moi une subite révélation.

Tu sais combien nos eaux sont souvent mauvaises aux États-Unis ; nous n’avons pas toujours de filtres Chamberlin sous la main, ou les caoutchoucs sont usés, et nous buvons des eaux qui détiennent une dissolution de matières calcaires, dans des proportions énormes.

Or, tu connais ma profonde affection pour ma pauvre mère, atteinte depuis des années d’une maladie mystérieuse et inguérissable qui se manifeste par des maux d’estomac intolérables et, chose curieuse, par une augmentation de poids anormal et tout à