Page:Vibert - Pour lire en automobile, 1901.djvu/319

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 291 —

Or a t-il si bien procuré,
Qu’il y a de présent curé
Et grand foison paroissiens.
Dieu lui multiplie ses biens
Et nous doient faire telz prières
Pour Perdrier et Perdrières,
Qu’en paradis où n’a soucy,
Puissent aller et moi aussi ! »

Eh bien, comme ce petit village de Médan est bien celui où vous villégiaturez depuis la guerre et comme j’ai moi-même passé les quinze premiers étés de mon enfance à Verneuil-sur-Seine, dans ce beau canton de Poissy où il y a une autre merveilleuse église qui remonte à Saint-Louis pour certains détails, j’ai résolu, en ce jour, pour vous distraire un peu des mélancolies de l’exil, de vous entretenir d’un bon type qui vivait dans ce village il y a environ trente-cinq à trente-six ans, sous l’empire, en y exerçant la modeste profession de desservant.

Ce brave curé, grand, maigre, solide, la barbe et les cheveux d’un roux fauve terne, très pauvre, mais fier dans sa pauvreté, avait un accent terrible ; il était Alsacien et n’appelait jamais mon père autrement que M. Vipère, et moi il m’appelait familièrement M. Baul.

Un jour, les gros bonnets des environs, comme Baroche qui était garde des sceaux et habitait Jusier, près de Meulan, lui avaient fait donner une soutane par l’Impératrice ; mais bast, il était toujours aussi pauvre.

Il est vrai que le casuel n’était pas riche en ce temps là à Médan ; mais cet homme, qui n’était pas fanatique pour un sou, disait sa messe devant un