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Ne veut point estre recogneu ;
Mais l’Amour, qui ne va que nu,
Ne souffre point qu’on se déguise.
Les Nymphes, au sortir des eaux,
D’un peu de jonc et de roseaux
Se font la coiffure et la robbe,
Et les yeux du Satyre ont droict
De regretter encor l’endroict
Que le vestement leur desrobbe.
Si vous sçaviez que peut l’effort
De vostre beauté naturelle
Et combien de vainqueurs pour elle
Implorent l’aide de la mort,
Vous casseriez ces pots de terre.
De bois, de coquille, de verre.
Où vous renfermez vos onguens ;
La nuict vous quitteriez le masque,
Et perdriez ceste humeur fantasque
De dormir avecques vos gans.
Lorsque vous serez hors d’usage
Et que l’injure de vos ans
Appellera les courtisans
A l’amour d’un plus beau visage,
Quand vos appas seront ostez,
Que les rides de tous costez
Auront coupé ce front d’albastre,
Taschez lors d’excroquer l’amour,
Et, si vous pouvez, chasque jour
Faites-vous de cire ou de plastre.
Si le ciel me faict vivre assez
Pour voir la fin de vostre gloire
Et me punir de la mémoire
De nos contentemens passez.
Je croy que je seray bien aise,
Ne trouvant plus rien qui me plaise,