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Un jour que tu voudras combattre au premier rang,
Je te verray couvert de poussière et de sang.
Et le cœur traversé d’une mortelle playe,

Tourner ces traistres yeux devers ton monument.
Lors, pour te faire voir que ma vengeance est vraye,
Je n’en jetteray pas un souspir seulement.


POUR UNE AMANTE CAPTIVE.

Tyrannique respect, triste et fascheux devoir,
Qui tiens si rudement mes volontez contraintes,
Dois-je mourir icy sans que je puisse avoir
Autre soulagement que celuy de mes plaintes ?

Souffriray-je, ô Thyrsis ! mon cœur gelé de craintes,
Dans le désir bruslant que j’ay de te revoir ?
Loix que ma passion devoit avoir enfraintes,
Garderez —vous tousjours ce rigoureux pouvoir ?

Je crois que le tyran qui d’éternelles flâmes
Donne le chastiment ordonné pour les âmes,
Quand je serois esclave au fonds de ses enfers,

S’il sçavoit le sujet de mon impatience,
Sentiroit, me voyant, blesser sa conscience.
S’il ne me permettoit de sortir de mes fers.