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A qui mes maux donnent à vivre,
L’hyver me donnera secours :
En me tuant, il me délivre
De mille trespas tous les jours.
Qu’il plaise à Vostre Majesté
De se remettre en la mémoire
Que par fois mes vers ont esté
Les messagers de vostre gloire.
Comme pour accomplir mes vœux,
Encor aujourd’huy je ne veux
R avoir ma liberté première
Que pour la mettre en ce devoir.
Et ne demande la lumière
-Que pour l’honneur de vous revoir.
Dans ces lieux vouez au malheur,
Le soleil, contre sa nature,
A moins de jour et de chaleur
Que Ton n’en faict à sa peinture.
On n’y voit le ciel que bien peu,
On n’y voit ny terre ny feu ;
On meurt de Tair qu’on y respire ;
Tous les objects y sont glacez,
Si bien que c’est icy l’empire
Où les vivans sont trespassez.
Comme Alcide força la mort
Lors qu’il luy fit lascher Thésée,
Vous ferez avec moins d’effort
Chose plus grande et plus aisée :
Signez mon eslargissement ;
Ainsi, de trois doigts seulement.
Vous abatrez vingt et deux portes
Et romprez les barres de fer
De trois grilles qui sont plus fortes
Que toutes celles de l’enfer.