Je me promene seul dans l’horreur des forests
Où le funeste orfraye et le hibou se perchent.
Là, le seul reconfort qui peut m’entretenir,
C’est de ne craindre point que les vivans me cherchent
Où le flambeau du jour n’osa jamais venir.
Je passe mon exil parmy de tristes lieux [
Où rien de plus courtois qu’un loup ne m’avoisine ;
Où des arbres puants formillent d’escurieux.
Où tout le revenu n’est qu’un peu de résine,
Où les maisons n’ont rien plus froid que la cuisine,
Où le plus fortuné craint de devenir vieux,
Où la stérilité faict mourir la lésine,
Où tous les elemens sont mal-voulus des cieux,
Où le soleil, contrainct de plaire aux destinées,
Pour estendre mes maux allonge ses journées.
Et me faict plus durer le temps de la moitié.
Mais il peut bien changer le cours de sa lumière.
Puis que le roy, perdant sa bonté coustumiere,
A destourné pour moy le cours de sa pitié.
Courtisans qui passez vos jours dans les délices
Qui n’esloignez jamais la demeure des roys,
Qui ne sçavez que c’est de la rigueur des loix,
Vous seuls à qui le ciel a caché ses malices,