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Que tout mon bien est mon sçavoir ?
Dequoy plus te pourrois-je plaire ?

Si mon mauvais sort peut changer,
Je jure de te partager
Les prosperitez où j’aspire,
Et, quand le Ciel me feroit roy,
Un présent de tout mon empire
Te feroit preuve de ma foy.

Mais tu n’as point l’esprit avare,
Et quelque dignité si rare
Qu’un Dieu mesme te vint offrir,
Quelque tourment qu’il eust dans l’ame,
Tu le laisserois bien souffrir
Avant que soulager sa flame.

Quant à moy, las de tant brusler,
Et si pressé de reculer,
J’ay désesperé de la place.
La nature icy vaut bien peu,
Qu’un front de neige, un cœur de glace,
Puissent tenir contre le feu.



À CLORIS.

STANCES.


S’il est vray, Cloris, que tu m’aymes,
Mais j’entens que tu m’aymes bien,
Je ne croy point que les roys mesmes
Ayent un heur comme le mien.
Que la mort seroit importune
De venir changer ma fortune
À la félicité des dieux !
Tout ce qu’on dit de l’ambroisie