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Cognoissent qu’il y va du leur,
Et, d’une passion humaine
Participans à ma douleur,
Promettent d’alléger ma peine.

La Parque, retrenchant le cours
De tes soleils, bien que si cours,
Rien que nuict sur toy ne devide !
Puisses-tu perdre tes habits,
Et ce qu’au parc de nos brebis
Peut souhaitter le loup avide !
T’arrivent tous les maux d’Ibis,
Comme le souhaittoit Ovide !

Cerès ne voit point sans fureur
Les miseres du laboureur,
Que ta froidure a fait resoudre
À brusler mesme les forests ;
Les champs ne sont que des marests ;
L’esté n’espere plus de moudre
Le revenu de ses guerests,
Car il n’y trouvera que poudre.

Tous nos arbres sont despouillez,
Nos promenoirs sont tous mouillez,
L’esmail de nostre beau parterre
À perdu ses vives couleurs ;
La gelée a tué les fleurs ;
L’air est malade d’un caterre ,
Et l’œil du ciel, noyé de pleurs,
Ne sçait plus regarder la terre.

La nasselle, attendant le flux
Des ondes qui ne courent plus,
Oysifve au port est retenue ;
La tortue et les limaçons
Trainent leurs pas par les glaçons ;
L’oyseau, sur une branche nue,
Attend, pour dire ses chansons,