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En disant bien de vostre vie ;
Lorsqu’elle veut parler de vous,
Sans artifice et sans courroux
Elle se produit toute nue,
Et, ses vains desirs abatus,
Faict gloire d’estre recogneue
Pour triomphe de vos vertus.

Personne n’est fasché du bien
Dont vostre sort heureux abonde,
D’autant qu’il ne vous sert de rien
Qu’à faire du plaisir au monde.
Ainsi le celeste flambeau,
Qui fut l’ornement le plus beau
Qu’enfanta la masse premiere,
N’a jamais eu des envieux,
Car il n’use de sa lumière
Que pour en esclairer nos yeux.

Chaque saison donne ses fruicts :
L’automne nous donne ses pommes ;
L’hyver donne ses longues nuicts,
Pour un plus grand repos des hommes ;
Le printemps nous donne des fleurs ;
Il donne l’ame et les couleurs
À la feuille qui semble morte ;
Il donne la vie aux forests ;
Et l’autre saison nous apporte
Ce qui faict jaunir nos guerets.

La terre pour donner ses biens
Se laisse fouiller jusqu’au centre ;
Et pour nous les champs indiens
Se tirent les thresors du ventre.
L’onde enrichit de cent façons
Nos vaisseaux et nos hameçons ;
Et cet element si barbare,
Pour se faire voir liberal,