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À MONSEIGNEUR LE DUC DE LUYNES.

ODE.


Escrivains tousjours empeschés
Après des matieres indignes,
Coulpables d’autant de pechez
Que vous avez noircy de lignes,
Je m’en vay vous apprendre icy,
Quel deust estre vostre soucy,
Et dessus les justes ruines
De vos ouvrages criminels,
Avecques des vers eternels,
Peindre l’image de Luynes.

Je confesse qu’en me taisant
D’une si glorieuse vie,
Je m’estois rendu complaisant
Aux injustices de l’envie,
Et meritois bien que le roy,
En suitte du premier effroy
Dont me fit pallir sa menace,
M’eust fait sentir les cruautez
Qu’on ordonne aux desloyautez
Qui n’ont point merité de grace.

À qui plus justement qu’à luy,
Se doivent nos sainctes louanges ?
Quel des humains voit aujourd’huy
Sa vertu si proche des anges ?
Ceux que le ciel, d’un juste choix,
Faict entrer dans l’ame des roys,
Ils ne sont plus ce que nous sommes,
Et semblent tenir un milieu
Entre la qualité de Dieu
Et la condition des hommes.