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Ne quittent leur sévérité,

Elles demeureront muettes.


Prince, je dis sans me louer,

Que le Ciel m’a voulu douer

D’un esprit que la France estime,

Et qui ne fait point mal sonner

Une louange légitime

Quand il trouve à qui la donner.


Mais le vice à qui tout aspire,

Maîtrise avecque tant d’empire

Ceux qui gouvernent l’univers,

Que chez les plus heureux monarques,

O honte de ce temps pervers !

A peine ai-je trouvé des marques

Qui fussent dignes de mes vers.


Et depuis que la Cour avoue

Ces âmes de cire et de boue

Que tout crime peut employer,

Chacun attend qu’on le corrompe,

Et les grands donnent le loyer

Tant seulement à qui les trompe.


Lorsque la force du devoir

Pousse mon âme à décevoir

Quelqu’un à qui je fais hommage,

Si quelquefois pour un mortel

Je tire une immortelle image,

C’est afin qu’il se rende tel

Qu’il se voit peint en mon ouvrage.


Mais quand je pense à ta valeur,

O que mon sort a de malheur !

Car même des nouveaux Orphées

Ne pourraient, en flattant le dieux,

Dire si bien que tes trophées

Ne méritent encore mieux.


Quels vers faut-il que je prépare ?