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feste fu moult grant et moult belle, que à paine le pourroit nul raconter. Les barons et les chevaliers furent vestuz de draps de diverses couleurs ; une foiz estoient en ver et l’autre en gris, en vert ou en escarlate et en plusseurs autres couleurs ; les fermaux d’or es poitrines et sus les espaules de grosses pierres precieuses si comme esmeraudes, safirs et jacinctes, pelles, rubis et plusseurs autres pierres precieuses de plusseurs autres manieres. Si avoient anniaux d’or es dois aournés de riches dyamans et de riches thopases ; et estoient leurs chiez aornez de riches treçoirs et de riches guimples toutes tissues à fin or et couvertes de pelles et autres pierres.

Les bourgois de Paris firent feste grant et sollempnel et encourtinerent la ville de riches draps et de diverses couleurs et de pailes et de cendaux. Les dames et les pucelles s’esbaudissoient en chantant diverses chançons et divers motez. Quant la feste fu passée, l’arcevesque de Sens[1] vint devant le legat Symon[2], prestre et cardinal de l’église Sainte Cecile et dit au legat, en complaignant, qu’il li feist droit de l’arcevesque de Rains qui li fesoit tort et injure de ce qu’il avoit coronnée la royne Marie de France en sa dyocese, et que à li n’appartenoit riens de ce faire se ce n’estoit en sa province, en la cité de Reins ; et monstra l’arcevesque de Sens une epistre[3] qui piece a fu acom-

  1. L’archevêque de Sens était alors Gilles II Cornut (15 décembre 1274-20 juin 1292).
  2. Simon de Brie qui, en 1281, devint pape sous le nom de Martin IV.
  3. Voir dans le Rec. des Hist. des Gaules et de la France, t. XV, p. 144, no cxiv, cette lettre d’Yves de Chartres écrite en