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VI.
De diverses maladies qui avindrent en l’ost des crestiens[1].

Grant pestilence de maladie commença parmi l’ost des crestiens ; les uns avoient dissintere, les autres[2] aguez et continuez[3], les autres enflez, et les autres moururent de mort soudaine ; et les autres qui eschapoient estoient li languereux que a grant paine se pooient il resourdre[4] ne aidier. De ceste pestilence se doloient moult les Sarrazins aussi comme les crestiens ou plus, et gisoient comme pourciaux touz pasmez et touz mors en leurs herberges, et les autres mouroient de mort soudaine par la grant corrupcion de l’air. Quant le roy[5] vit courre ceste pestilence parmi son ost, il se departi de son ost et se muça en souz terrines[6] pour eschiver celle grant pestilence qu’il ne perdist la vie. Les anciens Sarrazins, qui estoient esprouvez en experience, disoient que l’air estoit corrompu des cha-

  1. Guillaume de Nangis, Gesta Philippi regis Franciæ, dans Rec. des Hist. des Gaules et de la France, t. XX, p. 474-477. Cf. Chronique de Primat, ibid., t. XXIII, p. 79-81. Ce chapitre n’est pas la traduction littérale du chapitre correspondant de G. de Nangis.
  2. Sous-entendu, fièvres.
  3. Les autres aguez et continuez n’est pas donné par le ms. fr. 17270 de la Bibl. nat. Cf. Rec. des Hist. des Gaules et de la France, t. XX, p.. 475.
  4. Resourdre, se relever.
  5. Le roi de Tunis ; latin : « rex Tunarum ».
  6. En souz terrines, dans des grottes ; latin : « sub speluncis subterraneis ».