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nef[1], et furent avoec lui ses ii fiuz[2], et li autre entrerent chascun en sa nef. Les mariniers drecierent leur voiles[3] pour ce que le vent lor estoit bon, et se mistrent à la voie et siglerent pesiblement jusques au vendredi entour mienuit que le vent troubla la mer, et fist lever granz ondes et granz troubeillons qui hurterent aus nez si forment qu’il les fist departir ça et là. Le roy demanda aus mestres notonniers comment ce estoit que la mer estoit si engroissie ; et il respondirent : « Sire, noz sommes entrez en la mer de lyon qui est pas coustume orgueilleuse et plaine de tempeste ; et pour ce est elle apelée la mer du lyon et la redoutons plus que nulle autre mer. » Tant siglerent et tant nagierent qu’il passerent la mer du lyon en grant doute, et entrerent en une autre partie de mer qu’il trouverent plus debonnaire et siglerent jusques à diemenche paisiblement ; mais vers l’ajorner, le tourment fu greigneur que devant, et se douterent. Si tost comme il fu ajorné, le roy fist chanter iiii messes sanz sacrer. L’une fu du Saint Esperit, l’autre de Nostre Dame, la tierce des anges, la quarte des mors. Mès poi y avoit qui se peust soustenir tant estoit la nef souvent hurtée

  1. Saint Louis s’embarqua le mardi 1er juillet (G. de Nangis. Cf. d’Achery, Spicilège, t. II, p. 550).
  2. Pierre, comte d’Alençon, monta seul dans le bateau du roi, Philippe son fils aîné, le comte d’Artois et le comte de Nevers montèrent chacun dans leur bateau (Ibid.).
  3. Le mercredi matin (Ibid.). Voir dans Champollion-Figeac, Documents historiques inédits tirés des collections manuscrits de la Bibliothèque royale, t. I, p. 507 à 604 et p. 609 à 615, les conventions passées avec des Génois et des Marseillais, de 1268 à 1270, pour l’affrètement des vaisseaux et le transport des troupes.