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chascun an un chrestien le jor dou grant venredi, qui est en la semaine peneuse, et le menoient en leur crotes, souz terres[1], et en despit de Nostre Seigneur qui à tel jor fu crucifiez, le tormentoient et crucifioient, et au derrenier l’estrangloient en despit[2] de la foi chrestiene. Et ceste chose avoient-il fait maintes foiz au tens son pere, et avoient esté convaincu dou fait et ars. Et en tel maniere fu sains Richarz martyriez, dont li cors gist à Saint Innocent de Champiaus[3] ; pour cui Nostre Sires a puis faites maintes miracles en l’eglise où li cors de lui repose. Diligenment fist li rois enquerre se ce estoit voirs ou non, avant que il en feist plus. Il trova que ce estoit veritez, si comme renommée le raportoit. Lors commanda que li Juif fussent pris par tot le roiaume de France. Pris furent à un jor d’un samedi en leur synagogues, en la VIme kalende de Marz[4] ; despoillié furent d’or et d’argent et de robes, ausi come leur pere ancien despoillierent les Égyptiens, quant il trespasserent la rouge mer, au tens Moyses le prophete. Et en ce fu segne-

  1. Latin : « in cryptis subterraneis », dans des grottes souterraines. Le mot « crote » subsiste sous la forme creute dans la région du Chemin-des-Dames.
  2. En despit, en insulte ; latin : « in opprobrium ».
  3. Voir sur saint Richard, Acta Sanctorum, mars, t. III, p. 591-594 ; c’est à Pontoise qu’il aurait été mis à mort en 1179 (cf. abbé Lebeuf, Histoire de la ville et du diocèse de Paris, éd. Féchoz, t. I, p. 48 et 49).
  4. On a dans Rigord : « XVI kalendas Martii in Sabbato » ; mais, comme le fait remarquer H.-F. Delaborde, en 1180, le 16 des calendes de mars (14 février) tombait un jeudi ; il faudrait probablement lire : « XIV kalendas Martii » ; Raoul de Dicet rapporte cet événement au XV des calendes de février (18 janvier) (Rec. des hist. des Gaules et de la France t. XIII, p. 204 ; cf. A. Cartellieri, op. cit., t. I, p. 58).