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[1]Ci endroit nous covient touchier briement aucunes choses qui devant ont esté dites, pour plus plainement descendre à nostre matiere.[2]La generation des Merovées, de laquele li François soloient prendre lor rois, dura jusques au tens d’un roi qui ot non Hildric[3], qui, par le commandement le pape Estiene[4], fu desposez et tonduz en une abbaïe, à ce tens que Pepins, qui puis fu rois, estoit encores princes du palais. Si sembloit bien que la lignie fust ja fenie en li maismes, car cil rois n’estoit de nule vigor, ne dignes de nule loenge ; sanz nul pooir portoit le nom de roi tant seulement. Li prevost du palais, qui estoient adonc apelé li graignor de la maison[5], avoient en lor main les richeces et le pooir du roiaume ; au roi souffisoit li noms tant seulement. En sa chaiere seoit, la barbe sor le piz et les chevous espars sor les espaules[6], et mostroit par defors semblant de seignorie ; les messages qui, de diverses parties, venoient à cort ooit, et lor donoit tiex respons com l’on li ensegnoit ou come l’on li commandoit, ausi come se ce fust de s’auctorité. Li

  1. Cette transition est du traducteur.
  2. Éginhard, Vita Karoli Magni, chap. i.
  3. Childéric III.
  4. C’est le pape Zacharie qui donna à Pépin, par l’entremise de Fulrad, abbé de Saint-Denis, et de Burchard, évêque de Wurzbourg, l’autorisation de déposer Childéric III et de ceindre la couronne, et c’est Étienne II qui, le 28 juillet 754, sacra à Saint-Denis Pépin, la reine Bertrade et leurs enfants.
  5. « Majores domus » (Éginhard). Ce sont les maires du palais.
  6. « Crine profuso, barba summissa » (Éginhard).