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MATHURIN REGNIER

ramassa pour les asséner d’une main plus lourde encore sur la tête d’Henri IV :

Toute extresmc louange est pour toy trop petite *.

Encore n’est-ce pas là le pavé le plus pesant dont il ait accablé ce noble chef. Si Molière, qui prenait son bien partout où il le trouvait, n’a pas eu beaucoup de choses à changer au discours de Macette pour en faire un discours de Tartufe, il a eu moins encore à changer à VÉpitre liminéaire de Régnier au Roi pour en faire un discours de Thomas Diafoirus : « On lit qu’en Etyopie, il y avoit une statue qui rendoit un son harmonieux toutes les fois que le soleil levant la regardoit. Ce mesme miracle, Sire, avez vous faict en moy, qui touché de l’Astre de Y. M. ay receu la voix et la parole. » Pour apprécier à sa juste valeur un des mérites les plus contestés et cependant les moins contestables de Despréaux, il suffît de relire après cette Épitre liminéaire et après la Satire I de Régnier, le Discours au Roi et VÉpître I de Boileau, qui en sont des imitations. L’expression en paraîtra souvent terne et décolorée ; l’alexandrin, monotone et dépourvu de résonance :

On verra les abus par ta main réformés,
La licence et l’orgueil en tous lieux réprimés.
Du débris des traitants ton épargne grossie,
Des subsides affreux la rigueur adoucie.

On regrettera ces admirables vers qui font pardonner à Régnier les platitudes qui les entourent :

Et c’est aux mieux disans une témérité
De parler…
Où ta bonté discourt au bien de tes sujets.
Où nostre aise et la paix ta vaillance publie,
où le vice abatu
Semble en ses pleurs chanter un hymne à ta vertu’.

. Du Bellay, Sonnet à la Royne de Navarre, éd. de 1573, chez More ! p. 157, f" 2 ; Régnier, Satire I, vers 56, éd. Courbet, p. 11. . Satire I, vers 59, éd. Courbet, p. 11.