Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/277

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le poète ajoute, d’ailleurs, au caractère de son héros un trait qui n’est point du tout dans les romances. Il lui fait invoquer le vrai Dieu quand le chien apporte la tête de don Fadrique, la Vierge et saint Jacques quand on lui conseille de tuer le More pour avoir son argent. Abou-Sayd prend à témoin le Prophète, et on sent qu’il eût respecté ce serment ; don Pèdre jure Dieu, et bientôt il se flatte comme d’une œuvre pie de s’être parjuré : tenir parole à des païens, ne serait-ce point trahir l’Eglise et les saints, ses patrons ?

Hypocrite ou sincère, sincère plutôt dans cette dévotion, don Pèdre reçoit ainsi un titre nouveau à la haine de Leconte de Lisle. Et l’on ne se trompe pas, sans doute, en disant que l’Émyr exprime bien un peu la pensée du poète lorsqu’avant de mourir il fait cette réflexion :


Je suis content qu’un roi chrétien ne soit qu’un lâche.


Seulement don Pèdre fut-il un roi chrétien ?