Page:Vianey - Les Sources de Leconte de Lisle, 1907.djvu/103

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

attendait. L’empereur était-il mécontent de la mort de Kouttoub, qu’il aimait beaucoup ? Était-il dominé alors par une nouvelle passion ? Mher-oul-Nissa cessait-elle de lui paraître désirable depuis qu’elle était en sa possession ? On ne sait. Mais il refusa de la voir, lui donna le pire appartement du harem et ne lui assigna pour son entretien qu’une somme misérable.

Elle dissimula son dépit en feignant de pleurer la mort de son mari, et attendit son jour. Elle attendit de longs mois en vain et dut enfin se résigner à travailler pour vivre. Elle se mit à broder, et, comme elle y excellait, toutes les femmes de la ville voulurent avoir de ses ouvrages. Elle les vendait très cher et put ainsi se donner un grand luxe.

Elle était depuis quatre ans au harem sans que l’empereur, qui ne cessait d’entendre parler d’elle, eût manifesté le moindre désir de la revoir, quand un jour il se rendit chez elle à l’improviste, sous prétexte de voir ses broderies. Il tomba à ses pieds et jura de tout lui sacrifier. C’est ce qu’il fit ; car elle n’eut jamais de rivales et resta jusqu’à la mort de l’empereur la souveraine maîtresse de l’empire. Dès le lendemain de cette première entrevue, Djihan-Guîr l’épousa solennellement et par un firman impérial changea son nom de Mher-oul-Nissa en celui de Nour-Mahal (lumière du harem).

Son père Chaja devint grand-vizir et « prouva dans ce poste éminent qu’aucun talent ne lui était étranger ». Ses deux frères devinrent omrahs de première classe ; l’un d’eux, Asaph-Jah, succéda par la suite à son père et fut l’un des