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mandement. — C’est bien, dit le Jarle ; elle doit mourir, ayant trahi sa foi ; mais la main d’un serf ne la touchera pas.

Le moine sortit. À l’appel de la cloche, une femme entra, très belle, aux tresses blondes. — Il faut mourir, Tiphaine. — Je suis prête. — Priez encore auparavant.

Et Tiphaine pria sous ses longs cheveux d’or.

Elle s’oublia dans un rêve enchanté. Elle revit sa jeunesse, ses courses dans la lande, ses offrandes à l’autel de la Vierge, puis le premier éveil de l’amour, et alors le vieil époux au lieu du jeune amant, le retour de l’aimé, les combats, les remords, la passion plus forte, la chute et son enivrement. Tout est fini maintenant, et Tiphaine peut mourir, puisque le sang du jeune homme a déjà coulé.

— Femme, te repens-tu ? — Frappe. Je l’aime encore.

— Meurs donc dans ton impureté.

Tiphaine soulève ses cheveux d’or et pose sa tête sur le bloc, L’épée siffle et Tiphaine tombe. Le Jarle prend le corps dans ses bras et, montant sur la tour, le jette dans les flots hurlants. Alors, il fait un signe de croix et avec un cri sauvage il saute dans la mer, qui ne rejeta pas ses os sur le rivage.

Et le poète approuve, envie ces deux martyrs de l’amour.