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le sillon qui se creuse dans le sol, la brume que soulève la sueur des ventres, l’essaim d’insectes qui bourdonne autour :


L’oreille en éventail, la trompe entre les dents,
Ils dominent, l’œil clos. Leur ventre bat et fume,
Et leur sueur dans l’air embrasé monte en brume ;
Et bourdonnent autour mille insectes ardents.


Le spectateur suit les voyageurs des yeux. Ils finissent par n’être qu’une ligne noire à l’horizon. Puis, il n’y a plus, de nouveau, que le désert :


Aussi, pleins de courage et de lenteur, ils passent,
Comme une ligne noire, au sable illimité ;
Et le désert reprend son immobilité
Quand les lourds voyageurs à l’horizon s’effacent.


L’art de la composition ne saurait être porté plus loin.

Mais la peinture est aussi toute subordonnée à nous faire comprendre ce que veulent les voyageurs.

Ce sont des pèlerins, leur chef est un patriarche, leur voyage a un caractère religieux.

Ils traversent un désert immense et torride. Ils soufflent cruellement : le soleil cuit leur dos, leur ventre bat, la poussière les aveugle, les insectes les torturent, leur pied doit s’arracher des dunes qui s’effondrent. Pourtant, ils vont sans se plaindre, ni sans dévier. Ils vont là où ils veulent aller.

Ils en ont pris les moyens. Ils se sont groupés. Ils