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Quant à la Ximena, après lui avoir enlevé le nom français sous lequel Corneille nous l’avait rendue chère, Leconte de Lisle l’a revêtue en face du roi d’une morgue bien plus qu’espagnole. Car dans le Romancero elle s’excuse en terminant sa plainte de l’avoir portée devant le roi :


Pardonne si je parle ainsi : l’offense faite à une femme change le respect en outrage.


Et à ses récriminations les plus vives, elle donne un tour impersonnel qui en atténue le caractère agressif :


Un roi qui ne fait point justice ne devrait point régner, ni chevaucher à cheval, ni chausser des éperons d’or, ni manger pain sur nappe, ni se divertir avec la reine, ni entendre la messe en un lieu consacré, parce qu’il ne le mérite point[1].


Depuis qu’elle parle français, la Ximena ne sait plus dire : « Pardonne », et dans sa bouche, le reproche, perdant le tour impersonnel, devient très offensant :


Et toi, plus ne devrais combattre, cuirassé
Ni casqué, manger, boire, et te gaudir en somme
Avec la Reine, et dans son lit dormir ton somme,
Puisque, ayant quatre fois tes promesses reçu,
L’espoir de ma vengeance est quatre fois déçu…

  1. Autres plaintes de Chimène et ce que le Roi lui répond. — Chimène vient de nouveau porter plainte au Roi. Damas Hinard, t. II, p. 23, p. 20.