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Le voyant reconnaît ensuite les envieux, les mondains, les brigands, les profanateurs, les cupides condamnés à porter des fardeaux de plomb, les luxurieux à brûler, les calomniateurs à avoir les yeux arrachés par des corbeaux.

Leconte de Lisle retient le pittoresque du lieu, des personnages et des supplices. Mais il l’accroît singulièrement en transportant dans l’Enfer vu par Snorr la description du Hel ténébreux vue par la Louve, et que Bergmann a traduite ainsi :


La Louve vit une salle, située loin du soleil,
À Rives-aux-Cadavres ; les portes en sont tournées au nord ;
Des gouttes de venin y tombent par les fenêtres ;
La salle est un tissu de dos de serpents.
Un fleuve se jette à l’orient dans les vallées venimeuses,
Un fleuve de limon et de bourbe ; il est nommé Slidor ;
La Louve y vit se traîner, dans les eaux fangeuses.
Les hommes parjures, les exilés pour meurtre,
Et celui qui séduit la compagne d’autrui :
Là Frappe-de-Colère suçait les corps des trépassés…
Voici venir le noir Dragon volant,
La Coulœuvre s’élevant au-dessus des Montagnes du Midi ;
Frappe-de-Colère étend ses ailes, il vole au-dessus de la plaine
Au-dessus des cadavres.


Mais pour accroître le pittoresque des lieux vus par Snorr, la poète français consulte surtout son imagination, qui « se complait à décrire, nous dit Calmettes, les corps tordus dans les géhennes, les membres rompus,

    conte de Lisle a retenu le mot du commentateur : caractère runique.