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quand on leur parle des trente ou quarante témoins, qui, ayant vu le Dauphin, soit à Versailles, soit aux Tuileries, affirmèrent le reconnaître sur son lit de mort, au Temple. Peut-on croire, en effet, qu’il soit aisé de reconnaître, dans le cadavre d’un enfant de dix ans, le petit être qu’on avait contemplé, jouant, plein de santé, deux années et demie, trois années, quatre années auparavant ? Mais, c’est impossible ! Parlez-nous, au contraire, des vieillards, qui, après un demi-siècle, ou peu s’en faut, sont venus regarder d’un œil affaibli un homme mûr, et ont proclamé qu’ils retrouvaient en lui l’enfant qu’ils avaient vu au moins quarante ans plus tôt. Voilà qui est sérieux, et, seul, le témoignage de ces respectables vieillards doit compter ! Qu’on n’objecte point que Richemont a été reconnu par tout autant, et même par plus de personnes que Charles-Guillaume Naundorff ; qu’on ne dise pas qu’Hervagault et Mathurin Bruneau l’ont été aussi, que ce dernier a dépouillé une pauvre femme en lui persuadant qu’il était son fils qu’elle croyait mort, et qu’à une époque plus récente, la mère du vrai Tichborne a pris de même le faux Tichborne pour son enfant. Qu’importe !

Et puis, ce n’est pas tout : Naundorff avait un signe qui était une preuve péremptoire de son identité : il portait sur la cuisse un pigeon plongeant, les ailes ouvertes, dessiné par des veines. On l’affirme. Il montrait sa cuisse royale aux hésitants, à ceux qui voulaient voir pour croire, et cela lui attirait un certain