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ses Mémoires, fait le plus grand éloge, et dont pour sa part, elle n’eut jamais qu’à se louer. » Laurent, qui d’abord resta, pendant trois mois, seul chargé de la garde intime des deux enfants de Louis XVI, n’avait qu’un défaut : il avait peur, toujours peur, et la crainte qu’il éprouvait de se compromettre était si vive, qu’elle paralysait presque entièrement sa bienveillance[1]. Non, Laurent n’eût pas prêté les mains à une substitution ! D’ailleurs on veillait. Des commissaires de la Commune et plusieurs délégués de la Convention venaient souvent, à cette époque, visiter le petit prince captif. « Parmi les sept membres de la Commune chargés spécialement de la surveillance du Temple, il y en avait quelques-uns, dit M. Chantelauze, qui se montraient plus humains que leurs collègues. Ceux-là montaient parfois dans la chambre de l’enfant et lui apportaient quelques jouets, des plumes pour écrire, des cartes pour construire des châteaux. » Décidément, ce n’est pas encore à

  1. « Vous accusez Laurent de lâcheté ; c’est une abominable calomnie ! » me répond, avec son urbanité ordinaire, la Légitimité. Le mot qu’emploie le journal naundorffiste dépasse ma pensée ; mais je maintiens que Laurent n’était pas homme à s’exposer le moins du monde dans l’intérêt du Dauphin. Et la preuve, c’est que, malgré toute sa bonté d’âme, et bien qu’on lui eût permis d’avoir quelques égards pour le prince, il laissa s’écouler un mois et quatre jours avant d’oser faire nettoyer un peu la chambre, c’est-à-dire le cloaque épouvantablement infect où croupissait le malheureux enfant depuis le départ de Simon. La Légitimité ne contestera point cela.