Page:Verrier - Essai sur les principes de la métrique anglaise, 2e partie, 1909.djvu/182

Cette page n’a pas encore été corrigée

EsriiicTiQiE DL" im ii\ii:

Tennyson(i) et surtout Walt Whilman (2) ont même employé un vers presque tout à fait libre ; mais cette prose rythmée, ii laquelle a sans doute préparé le blank verse et conduit surtout l'imitation de poèmes allemands, n'a point son origine dans le mètre national. Celui-ci se reconnaît facile- ment h travers toutes ses métamorphoses. Par ses diverses formes, les unes à rythme régulièrement dissyllabique (3) ou trissyllabiquc (4)' les autres à rythme mixte (">), il rappelle d'assez près la dilTérenciation du té- tramètre grec en vers ïambiques, trochaïques, anapestiques et dactvliques, où souvent figurent cote à cote des pieds de deux ou de trois syllabes.

^ lOG. Quant au genre du rythme, MM. Ilermann Mùller,' Heusler et Sievers croient qu'il était binaire dans le vers allitéré (6). Il semble qu'on peut l'affirmer du vers d'Otfrid (7). C'est aussi le rythme binaire que présentent les airs anciens sur lesquels les Féroéiens chantent encore leurs petits poèmes épico-lyriques du cycle de Sigurd. On ne peut voir nulle part une influence des hymnes latines : elles se chantaient sur le rythme des strophes ïambiques ou des trochaïques, qui leur servaient de modèles et dont elles adoptaient sans aucun doute la musique (8), c'est-à-dire sur un rythme ternaire. Pour que la poésie germanique du moyen âge, même religieuse, employât ainsi dans le chant un rythme binaire,'il fallait qu'elle l'eût hérité de sa versification primitive et que pour des raisons en grande partie linguistiques elle n'eût pas pu y renoncer. Ce n'était pas seule- ment le rythme du chant, mais à plus forte raison celui de la diction me- surée. Le chant, d'ailleurs, conserve toujours à l'origine le rvthme naturel des paroles, soit exactement, soit en le régularisant. Ce qui est vrai du vers d'Otfrid, l'est sans doute aussi du vers de Layamon(9). LeVvthme est binaire dans la nursery rhyme qui en a le mieux gardé la forme primitive {Goosey, Gooser, Gander). Il l'est aussi bien souvent dans les proverbes et les dictons. Il se peut néanmoins que l'affaiblissement progressif des voyelles inaccentuées ait entraîné peu à peu un changement de genre dans le rythme anglais. C'est le rythme ternaire, si je ne me trompe, qui do- mine dans \es. nursery rhymes {10). En revanche, sur les lU chansons an-

(r) Maud, p. ex. XIV, 4.

(3) Leaves of Grass, etc.

(3) Common, Long et Short Measures des liymncs. ainsi que les stroplics iilcntiqucs de la poésie profane ; octosyllabe des poèmes narratifs ; mètre de A Psalm of Lift- (Longfellow), etc.

(!t) Le tumbling lerse régulier ; le mètre de The Destruction of Sennacherib (Bvron), etc.

(0) La. Doggerd Ehyme des Elizabethan Dramas. le tumbling i-erse ordinaire"^ ■ la strophe de Inchcapc Bell (Soulhey), The Ancient Mariner (Coleridge), The Sensitive Plant (Shellev) 5 le vers <le The Lar of the Last Minstrel (Scott), Chrisiabel (Coleridge), ThePiedPiper of Hameîin (Broyv- mng), etc.

(6) Pour M. Sievers, il ne s'agit que du Ijdâahâttr. (v. Germ. Metr., p. 282). Mais il dérive aussi le vers normal d'un vers primitif à V^ (ib-, p. 180 et suiv.).

(7) V. Saran, Zur Metrih Otfriils. p. 182-189, et Erk-Buhme, Liederhorl, 111, p. 779 et suiv.

(8) C'est bien là ce que dit Bède (v. p. i53, note 3).

(9) J'entends par là, faute d'un meilleur nom, la forme du vers indigène qui a succédé à l'an- cien vers allitéré.

(10) Sur les 5o que Beljame a publiées dans ses Chansons anglaises (Paris, 1901), il n'v en a <iue 16 de rythme binaire. Voici les plus connues : Goosey, goosey, gander — Baa, baa,'blaci"